Ce soir, dimanche 8 mars, retour de vacances oblige, le train est bondé.
Pendant un moment, j’ai cru qu’il y aurait des places libres en voiture 8. Mais quelques minutes avant le départ du train, l’équipe de foot de Mulhouse, est arrivée et l’espoir d’un voyage confortable c’est envolé. Des joueurs ceci dit en passant pas franchement joyeux alors qu’ils venaient de se faire battre 1 à 0 par l’équipe de Fleury-Mérogis, et que leur président emblématique venait de leur annoncer son départ du club.
C’est donc le coeur lourd que j’ai rejoint la place réservée pour y découvrir ma future voisine, une femme immense, avec de longs cheveux noirs, maquillée comme une bonbon et outrageusement pulpeuse. Même assise de biais, ses genoux touchent le dossier du siège en face d’elle.
Une poitrine et des fesses si impressionnantes que je me suis surpris à redouter qu’elle ne se dégonfle subitement et qu’elle s’envole en sifflant à travers le compartiment. La pensée me fait sourire. Croisant mon regard, elle me retourne la politesse. Je m’installe. Absorbée par la rédaction de SMS sur un smart phone dont en coque de protection est couvert de (faux) diamants, elle ne se rend même pas compte que j’ai à peine de quoi caser mes propres fesses. Je la regarde, elle sourit, brièvement, enjôleuse, mutine. Même ses dents, ses lèvres et ses doigts aux ongles interminables valent le détour.
Le chirurgien à l’origine de cette œuvre d’art vivante doit couler des jours heureux dans un paradis fiscal.
J’ai à peine le temps d’être content de cette idée que la porte du compartiment s’ouvre avec fracas. Une version beaucoup plus jeune et naturelle, petite et frisée apparaît dans l’allée centrale, elle regarde dans notre direction en souriant aux gens qu’elle percute avec un déhanché à déboiter l’articulation d’une. Une blonde la suit un téléphone vissé à l’oreille. Arrivé à notre auteur, elle me sourit, s’excuse des yeux et interpelle ma voisine en espagnol, la voix nasillarde.
Leopolditido, mon chéri, tu as trouvé une place toi. Nous, « cacahouète » (en Français dans le texte).
Le contrôleur, putain de sa mère, nous a dit d’aller en voiture huit mais tout est complet ajoute en râlant, la blonde en Français avec un accent prononcé des pays de l’est.
Il ne reste plus qu’à nous installer dans le couloir, sur nos valises, comme des clandestines, poursuit la brune en tournant les talons, la moue boudeuse, suivie de près par la blonde.
Arrête de pleurer mon chaton, on arrive bientôt, lui lance en rigolant Leopoldito, d’une voix de basse proportionnelle à sa carrure, me gratifiant au passage d’un large sourire.