Certaines personnes déborderaient-elles d’imagination lorsqu’il s’agit d’enquiquiner le monde? Ce dimanche matin, je monte dans le train à 6 h 17 à destination de Paris Gare de Lyon. Je suis d’excellente humeur. Disposé comme rarement à affronter tout ce qui peut se présenter. Sur le quai, je m’autorise même un petit échange avec l’agent de la SNCF de permanence sur la neige et le beau temps, les quai qui ne glissent plus, la température réelle et ressentie, les saisons qui n’en sont plus…
Je m’installe dans l’espace famille qui est vide. Une jeune femme qui me suivait fait le même choix.
Elle a deux gros sacs, dont elle sort quatre pots de yaourt Activia, une cuillère, une pile de courrier digne d’un facteur en début de tournée, une trousse avec des stylos et des marqueurs, une calculette, une grosse agrafeuse et un paquet de chewing-gum à la chlorophylle.
En mâchant la bouche ouverte, elle déchire une première enveloppe, qu’elle froisse en boule, jette dans la poubelle. Elle plie le document, l’agrafe et recommence l’opération avec l’enveloppe suivante, ponctuant chaque étape en faisant bulles qu’elle éclate. Déchirer, déplier, froisser, agrafer, claquer la bulle, classer, déchirer, déplier, froisser, agrafer, claquer la bulle….
Au secours, il est 6 h 25 du matin. Est-elle au courant ?
Imperturbable, méthodique, elle déchire, déplie, froisse, agrafe, claque la bulle, classe, déchire, déplie, froisse, agrafe, claque la bulle…
Une vingtaine de minutes plus tard, n’y tenant plus, je décide de ramasser mes affaires et de remonter le train en quête d’une place plus tranquille….
Y a des jours où on ferait mieux de rester sous sa couette…