Le dimanche, la Sncf ressort ses tacots

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Au risque de me répéter, j’aime bien voyager en train. À deux exceptions, le vendredi soir et le dimanche. Le vendredi soir, les usagers ou clients que je croise d’ordinaire dans les gares et les trains sont très différents de ceux qui voyagent en semaine. Je ne vais pas rentrer dans les détails, mais la concentration d’excitation, d’irritabilité, d’irrespect au mètre carré est souvent à la limite de ce que je peux supporter. C’est la même chose, parfois en pire, le dimanche soir… On dirait que certaines personnes ont décidé de vous faire payer le  fait que leur weekend se termine.

Pour ce qui est du dimanche matin c’est souvent les conditions matérielles qui en sont la cause. Voilà des années que je fais les allers retours un dimanche sur deux et j’ai le sentiment que ce jour-là, la SNCF en profite pour ressortir les grands anciens, les malades, les bancals, histoire de leur faire prendre l’air. Je parle des trains bien entendu… Le TGV du 3 septembre en était la parfaite illustration.

Dès son entrée en gare avec une vingtaine de minutes de retard, liée à une « sortie tardive du dépôt, on comprenait que le carrosse censé nous transporter à Paris Gare de Lyon avait déjà bien vécu. A commencer par la motrice à la calandre constellée de bosses et rayures. À bord, le sentiment  de délabrement se confirmait à l’odeur entêtante de désinfectant mêlé à du produit de traitement des WC chimiques ; aux sièges usés à la corde ; à l’absence poubelles ; à certaines tablettes cassées, à la moquette souillée, à la clim bloquée en mode canicule pulsant un air glacial, aux messages du chef de bord ininterrompus par des grésillements et des absences. En arrivant à ma place, je constaterai que mon accoudoir droit était cassé et impossible à relever, tout comme le dossier… Je ne parles pas de la poussière et de la crasse dans les grilles d’aération, des taches suspectes au plafond… et de l’état lamentable des toilettes. Enfin de celles qui étaient encore en service une demi-heure après le départ… Mais là, je serai plus clément, conscient que viser juste dans un train qui tangue autant relève de l’exploit… Bonne journée

Un voyage dans l’Amérique indienne avec l’écrivain David Treuer

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Un voyage dans l’Amérique indienne de David Treuer,

Éd. Albin Michel, Coll. « Terres d’Amérique ». Traduit de l’anglais (États-Unis) par Danièle Laruelle. 420 p., 24 €

L’Amérique du Nord compte des réserves indiennes disséminées sur l’ensemble du continent. Reliquat des terres indiennes ancestrales et héritage d’une histoire violente et tragique, certaines couvrent à peine quelques hectares quand d’autres, comme celle des Navajos en Arizona, rivalisent avec certains états américains comme le Connecticut.

Quelques-unes sont prospères notamment grâce aux casinos, la grande majorité connaît une extrême pauvreté. « Il y a environ trois cent dix réserves indiennes aux États-Unis », précise David Treuer dans l’introduction de son ouvrage. « Mais le Bureau des affaires indiennes n’est pas certain de leur nombre exact – ce qui en dit long sur cet organisme et sur la nature même des réserves », ajoute cet auteur d’origines indienne (ojibwé) par sa mère et autrichienne par son père.

Avec cet essai, ce romancier connu et reconnu (1), enseignant, nous fait découvrir ce monde de l’intérieur, loin des stéréotypes, mêlant sa propre expérience, des témoignages, des faits historiques. David Treuer a grandi sur la réserve de Leech Lake dans le Minnesota, à deux pas de la frontière canadienne.

Il fait le tour des questions qui agitent les réserves: droits de pêche et de chasse, question des gangs, gestion des casinos… Il évoque également la relation entre les Blancs et les Indiens, la sauvegarde des langues traditionnelles… Tout cela est abordé avec panache et délicatesse, et un souci permanent d’objectivité comme lorsqu’il dénonce sans détour la corruption de certaines élites indiennes. Pour lui, comprendre les Indiens, c’est comprendre l’Amérique.

 (1) Trois de ses romans: Little, Comme un frère et Le Manuscrit du docteur Apelle (lire La Croix du 24 mai 2007) sont édités par Albin Michel.

 

« Cette été,  j’étais aux States »

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IMG_5482Dimanche soir. Le train de 19 h 23 est bondé. Complet. Le compartiment grouille d’usagers. Ça sent le pâté, les chips, la bière, la friture, le jambon et la sueur….. Je n’ai-pas le choix que de m’installer à ma place.

Mon futur voisin est un type imposant qui empeste la soupe à l’ognon. Son sac est posé sur le siège. Il m’explique qu’il ne sait pas quoi en faire. Je lui suggère de le poser dans l’espace au dessus de nos têtes. Il me dit qu’il est trop gros. Je lui propose d’essayer. J’y arrive presque. Une bouteille dans la poche bloque. Je lui suggère de l’enlever.

C’est que je n’ai pas soif pour le moment, me répond-il, en jouant avec ses trois téléphones portables. D’un air ton de plus en plus agacé par la situation je lui propose de prendre sa valise sur mes genoux. Il s’insurge… Mais non on va enlever la bouteille. Je voudrais pas abuser…

Je m’installe, le forçant à serrer les jambes et à se pousser.

J’ai du boulot, j’ouvre mon ordinateur. Demain matin je rends un article sur un papier sur l’excellent bouquin de Craig Davidson. Cataract City.

« Le rêve américain, lit à haute voix mon voisin… Vous écrivez un article ?

J’acquiesce…

Cet été, j’étais aux States … Le rêve américain, je l’ai vécu de près… J’ai vu des rues pleines de clodos à New York… Le rêve américain c’est pas pour tout le monde….

Je referme mon ordinateur. Je ne travaillerai pas ce soir…

C’est quoi votre journal ? l’Express ? Le Point ?

La Croix.

Super ce journal. Je l’ai jamais lu, mais paraît qu’il est sérieux… C’est pas un peu beaucoup catho ? Vous êtes catho ? Vous avez par une tête de catho ?

Je n’ai pas le temps de répondre qu’il ajoute : et vous allez parler du rêve américain à vos lecteurs ? C’est pas vraiment catho le rêve américain…

C’est une critique de roman…

Ah ok. Je comprends mieux… Vous lisez les livres au moins ? Moi, je ne lis jamais de roman. Je passe déjà mes journées dans des plans et des revues techniques, c’est pas pour lire des romans.

Je lui demande ce qu’il fait comme métier.

Ingénieur génie civile… Les ponts, les tunnels, les ouvrages d’art, vous voyez de quoi je parles ?

Intéressant comme métier.

Mais prenant. Voilà quinze ans que je bosse sans arrêt, dans toute l’Europe, avec parfois près d’une centaine de zigs sous mes ordres et des responsabilités à se bouffer le cul… J’en peux plus. J’ai décidé d’arrêter quelques mois. Histoire de souffler, de réfléchir, voyager…

Lire ?

Qui sait, je lirai peut-être le bouquin de Valérie sur François…. Certainement pas des histoires sur le rêve américain… sourit-il en me gratifiant d’un clin d’œil. Lorsque le train entre en gare, il s’excuse.

Désolé faut que j’aille fumer…

Voyager la tête en bas, le pied!

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91705065Ma voisine d’hier était déprimée, celle d’aujourd’hui est enceinte. Une habituée, elle aussi, des allers et retours quotidiens entre Dijon et Paris avec qui j’ai déjà  voyagé. Elle passe son temps à se caresser le ventre et à boire de grandes gorgées d’eau minérale.

Annonce du contrôleur. Elle grimace et se redresse dans son siège. Bébé vient de se réveiller. Son ventre s’anime. Si je n’avais pas eu 5 enfants, ou plutôt si ma femme n’avait pas eu 5 enfants dont je suis ( l’heureux) papa. Cette vision pourrait faire flipper (comme le disent mes enfants).

Nos regards se croisent.

Comme Alessandra Sublet? (Cette semaine du 14 au 18 avril, l’animatrice de France Télévision est en couverture de Paris Match, où elle confirme et annonce une nouvelle grossesse et une nouvelle émission !)

Elle éclate de rire. Bébé redouble de coups de pieds. Son ventre bouge dans tous les sens. Le père de cinq enfants serait presque impressionné.

On dirait qu’il ou elle apprécie le voyage?

Il adore.

Félicitation. J’espère que vous lui avez déjà pris sa carte Grand Voyageur ?

Bien sûr. Elle rit en essayant de suivre les pieds de bébé qui s’impriment sur son ventre.

Il a déjà la carte Club.  Et quand le train est en retard, on cumule points monnaies à deux….

Vous pourrez acheter des couches et biberons avec…

Le contrôleur passe. Le même que la veille.Femme-enceinte

Vous coucher dans le train? me demande-t-il en prenant ma carte d’abonnement. Pour madame cela ne doit pas être confortable.

Je n’ai pas le temps de lui dire que je ne suis pas le mari de cette jeune femme  qui doit être à peine plus âgée que ma fille aînée, qu’il ajoute, en prenant un air de circonstance : « Mais dites-donc, vous êtes trois et je ne vois que deux billets. Va falloir que je sanctionne, sourit-il en nous adressant un clin d’œil et un chaleureux :  Félicitation et bonne journée à vous trois….

Ma voisine éclate de rire en se tenant le ventre à deux mains.

A en juger par votre tête vous ne semblez pas prêt a en accueillir un sixième….

Si vous saviez…. Je ne veux pas vous faire peur, mais si j’ai un conseil  de vieux con à vous donner, profitez-en quand ils sont jeunes…

 

 

 

 

Un mec nommé Hugo

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lucrèce bonUn dimanche soir ordinaire à bord du Paris-Belfort de 19 h 23. Une jeune fille brune et sa mère rentrent de week-end.

La maman demande :

Tu n’as rien oublié chez ton père ?

Non… Et c’est pas grave, j’y retourne dans quinze jours…. Oh merde…

Quoi ?

Mon livre… J’avais un bouquin à lire pour demain.

Bravo. Et tu vas faire comment ?

T’inquiète je l’ai avec moi. Je m’y colle…

Elle sort un livre froissé et corné de son sac à main.

C’est quoi ?

Lucrèce Borgia de Victor Hugo… Eh maman tu sais quoi ? Lucrèce c’est une meuf. Putain je croyais que c’était un homme…  Et tu sais quoi le mec, il a écrit cette pièce en quinze jours… T’y crois toi ?  Trop fort.

Valise à roulettes, je te hais

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en ordre de batailleOn la croise partout, sous différentes formes, tailles, couleurs. Dans les aéroports, les grandes surfaces, en ville, à la campagne, sur le chemin de l’école, du travail et dans les gares. Il s’en vendrait plus de deux millions par an dans l’Hexagone.

Quelle que soit l’heure, de la journée ou de la nuit, à l’arrivée ou au départ d’un train, chaque jour, c’est le même festival de valise à roulettes qui s’enclenche. Le bruit entêtant de centaines de petites roues sur le ciment, les passerelles en bois ou en acier vous vrille les tympans. Si vous ne faites pas attention, la probabilité de vous faire écraser les pieds, d’avoir les tendons sciés, ou de trébucher monte en flèche.

Si vous êtes pressé, éviter l’escalier mécanique. Le  flux de voyageurs peut être bloqué à tout moment par un voyageur qui s’arrête, sans crier gare,  pour chercher comment rentrer la poignée télescopique de sa valise  et en haut,  comment la sortir…

J’en suis conscient, cette haine n’a rien de rationnelle. Elle frise le ridicule. Il serait préférable d’apprécier cet objet pour le confort qu’il procure aux usagers. Mais c’est plus fort que moi. Je déteste cet objet. En particulier celle avec quatre roulettes, si facile à tirer, qui change de direction sans le moindre effort pour mieux faucher l’usager rêveur ou mal réveillé…

Ce lundi 3 mars matin, à l’aube,  j’ai failli craquer lorsqu’une quadra brune, aux lèvres pincées, tractant une grosse valise grise a commencé à faire d’innombrables allers et retours fiévreux autour de moi comme un papillon de nuit dans la lueur d’un réverbère.

A chaque passage, pour l’éviter,  je devais reculer d’un ou deux pas. Jusqu’au moment où bloqué par un mur, mes pieds n’ont pas échappé aux roulettes, déséquilibrant sa valise qui terminera sa course  sur une roue et dans les jambes d’un autre usager.

Madame…  criais-je alors excédé. Madame… Elle se retourne, interloquée.

Votre valise. Faut faire attention.  Vous n’arrêtez pas de me couper la route depuis dix minutes, de passer et repasser. Ça suffit.

Elle me regarde la mine défaite. Ne sachant que répondre. Profitant de l’annonce du départ imminent  du train, elle s’éclipse sans se retourner,  suivi de près par sa grosse valise.