Les bons comptes font les bons amants

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IMG_0232Salon grands voyageurs de la gare de Lyon à Paris.  18 H 45. Ce soir, les places sont rares. Le va-et-vient est permanent. Essentiellement des cadres d’entreprises. Il y ceux et celles qui font la queue pour aller aux toilettes, ceux  et celles devant  le distributeur de boissons gratuites et le présentoir à magazines.

Avachi dans un fauteuil, le dos au mur,  bien calé par un moelleux petit coussin,  j’observe tout ce beau monde plein de d’assurance et de suffisance parfois, en sirotant un thé. Deux très jolies jeunes filles aux sourires professionnels sont à l’accueil. La première vous souhaite  « bienvenue » après avoir vérifié votre carte d’abonnement, la seconde « bon voyage » lorsque vous partez. Une femme de ménage d’origine pakistanaise, slalome en s’excusant entre les uns et les autres ramassant les gobelets, journaux et autres déchets.

A ma gauche, une place se libère. Une petite femme d’une quarantaine d’années aux longs cheveux blonds, sportive, élégante, décontractée et délicatement parfumée, s’installe. Elle croise et décroise les jambes, se redresse dans son siège, soupir en dégainant son téléphone portable. Lit quelques  SMS. Le dernier la fait sourire. De ses doigts aux ongles vernis, elle pianote un numéro avec empressement.

Quelques instants d’attente et son visage s’illumine. Allo ? C’est moi. Ca va? (silence complice) Je suis épuisée… susurre t-elle. Mon responsable m’a proposé une mission qui me tente… Non. (Silence entendu) Oui. Toi aussi tu me manques. J’arrive à 23 heures 30.  Oui… ( Silence complice); Non j’ai acheté de quoi mangé, ne m’attends pas… Tu es trop mignon…. Oui moi aussi, chuchote-t-elle…   Demain je bosserai de la maison… (Silence inquiet)  Pourquoi me demandes-tu cela?

Son vissage jusqu’à cet instant souriant et enjôleur, se crispe. Deux plis d’amertume se forment de chaque côté de sa bouche, son corps se raidit, elle observe le revers et l’intérieur de sa main libre.

Non, Gérôme, je ne peux pas… (silence pesant) Je comprends pas… Tu comptais sur moi?… Quel est le montant de cette facture ? Et pourquoi, ce serait à moi de payer ? Je peux pas.. Certes, j’ai  eu une prime mais je mets cet argent de côté. Je n’y touche pas. Et je ne peux pas payer ce mois-ci. Tu exagères. Non. On en parlera plus tard. Je suis épuisée. Tu choisis toujours les mauvais moments pour aborder ces sujets. Tu me gonfle.  Elle raccroche, le visage définitivement fermé. Elle rassemble ses affaires et prend la direction des quais… répondant, d’un regard vide au « bon voyage » de l’une des hôtesses…

Adieu la carte grand voyageur? IDPASS pour tous et porte-à-porte

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IMG_0292Hier au boulot, des collègues bien intentionnés, « lecteurs » occasionnels de mon blog et de mes interminables aventures avec mes différentes cartes d’abonnement m’ont fait savoir que la SNCF envisageait de supprimer la carte Grand Voyageur…

Après avoir fait comme si cette info ne me faisait ni chaud ni froid, je me suis précipité sur l’excellent article de mon confrère annonçant cette réforme à venir à la SNCF.

En réalité, annonce l’article, toutes les cartes seront fusionnées en une seule, un IDPass, qui portera à la fois les billets, la carte Voyageur et les cartes commerciales. De même, les différentes applications mobiles de la SNCF seront fondues en une seule dans les prochaines années. Les TER sont aussi le champ d’expérimentations diverses comme cette bibliothèque électronique de livres à télécharger sur la ligne Metz-Luxembourg.

La philosophie du « porte-à-porte »

La compagnie ferroviaire a insisté sur la philosophie du « porte-à-porte », c’est-à-dire sur les offres conjuguant moyens de transports et services avant ou après le train. C’est par exemple le covoiturage de courte distance, avec IDVroom (ex 123envoiture.com). Ou encore l’expérimentation à Lyon d’un service de parking gratuit pour les voyageurs Ouigo s’ils acceptent que leur voiture soit louée pendant leur absence à d’autres usagers.

Selon Guillaume Pepy, ces activités doivent « consolider » le transport collectif en utilisant toutes les convergences possibles : « Notre ennemi, ce sont les premiers kilomètres. Il faut convaincre le plus possible de voyageurs de quitter leur voiture pour emprunter un train. »

 

 

 

« Cette été,  j’étais aux States »

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IMG_5482Dimanche soir. Le train de 19 h 23 est bondé. Complet. Le compartiment grouille d’usagers. Ça sent le pâté, les chips, la bière, la friture, le jambon et la sueur….. Je n’ai-pas le choix que de m’installer à ma place.

Mon futur voisin est un type imposant qui empeste la soupe à l’ognon. Son sac est posé sur le siège. Il m’explique qu’il ne sait pas quoi en faire. Je lui suggère de le poser dans l’espace au dessus de nos têtes. Il me dit qu’il est trop gros. Je lui propose d’essayer. J’y arrive presque. Une bouteille dans la poche bloque. Je lui suggère de l’enlever.

C’est que je n’ai pas soif pour le moment, me répond-il, en jouant avec ses trois téléphones portables. D’un air ton de plus en plus agacé par la situation je lui propose de prendre sa valise sur mes genoux. Il s’insurge… Mais non on va enlever la bouteille. Je voudrais pas abuser…

Je m’installe, le forçant à serrer les jambes et à se pousser.

J’ai du boulot, j’ouvre mon ordinateur. Demain matin je rends un article sur un papier sur l’excellent bouquin de Craig Davidson. Cataract City.

« Le rêve américain, lit à haute voix mon voisin… Vous écrivez un article ?

J’acquiesce…

Cet été, j’étais aux States … Le rêve américain, je l’ai vécu de près… J’ai vu des rues pleines de clodos à New York… Le rêve américain c’est pas pour tout le monde….

Je referme mon ordinateur. Je ne travaillerai pas ce soir…

C’est quoi votre journal ? l’Express ? Le Point ?

La Croix.

Super ce journal. Je l’ai jamais lu, mais paraît qu’il est sérieux… C’est pas un peu beaucoup catho ? Vous êtes catho ? Vous avez par une tête de catho ?

Je n’ai pas le temps de répondre qu’il ajoute : et vous allez parler du rêve américain à vos lecteurs ? C’est pas vraiment catho le rêve américain…

C’est une critique de roman…

Ah ok. Je comprends mieux… Vous lisez les livres au moins ? Moi, je ne lis jamais de roman. Je passe déjà mes journées dans des plans et des revues techniques, c’est pas pour lire des romans.

Je lui demande ce qu’il fait comme métier.

Ingénieur génie civile… Les ponts, les tunnels, les ouvrages d’art, vous voyez de quoi je parles ?

Intéressant comme métier.

Mais prenant. Voilà quinze ans que je bosse sans arrêt, dans toute l’Europe, avec parfois près d’une centaine de zigs sous mes ordres et des responsabilités à se bouffer le cul… J’en peux plus. J’ai décidé d’arrêter quelques mois. Histoire de souffler, de réfléchir, voyager…

Lire ?

Qui sait, je lirai peut-être le bouquin de Valérie sur François…. Certainement pas des histoires sur le rêve américain… sourit-il en me gratifiant d’un clin d’œil. Lorsque le train entre en gare, il s’excuse.

Désolé faut que j’aille fumer…

Seul maître à bord après Dieu, le contrôleur

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controleur-SNCFJe devrais le savoir, on ne dit plus « contrôleur », mais « Agent de bord ».  Hypocrisie… Dans la réalité, il est le maître. Le seul à bord. Il décide de votre  sort, de votre confort, de votre avenir.

Je m’emporte ? A peine !  Petit exemple, parmi d’autres  : ce soir-là, le train à destination de Belfort est bondé (et en retard de 25 minutes !).   Pas question d’aller me refugier dans la voiture 4 (où se trouve le bar). Même ces places sont réservées, ce qui est un indicateur infaillible de remplissage.

À peine assis à ma place, je m’aperçois que mon siège est cassé.  Il passe de la position assise à inclinée en permanence. Ce qui est très perturbant d’autant que cela agace beaucoup ma voisine, un vieux coton tige au regard de vipère.

J’interpelle le contrôleur. Je lui explique la situation précisant que je suis un client avec un abonnement forfait. Que je fais des allers et retours quotidiens.

Il me répond que je suis « courageux »  et qu’à son grand regret le train est plein…

Je le remercie.

Il m’explique que ce TGV date des années 80 (les fameux TGV oranges). Que le matériel est vétuste. Que la rénovation d’une voiture coûte un « bras ». Il me donne même un montant précis que je n’entends pas…

Je lui demande s’il serait possible d’aller en première. Que je suis prêt à payer le supplément (j’ai vu qu’il restait des places disponibles).

Il me répond qu’à « son grand regret », étant titulaire, d’un  abonnement forfait, il ne peut me surclasser. Qu’il faudrait racheter un billet.

Comme on dit à la SNCF : À nous de vous faire préférer le train.IP3VISO11040759

PS : Il serait injuste envers les agents de bord(avec lesquels j’entretiens de très bons rapports) de ne pas préciser que la plupart du temps,  ils  font leur possible pour trouver une solution.

Comme me l’a résumé un contrôleur à qui je racontais cette histoire : « je crois que ce soir-là tu es tombé sur un con ».

Cela serait-il la solution en cas de problème  ?